Ici au pays, on ne dit pas la Garonne mais Garonne (Garona, prononcer Garouno en gascon) ; le fleuve est personnifié montrant ainsi tout le respect et aussi la crainte qu’il inspire. Ses « aïgats[1] » sont attendus et redoutés. Attendus car les inondations qui envahissent la vallée laissent, quand les eaux se retirent, le précieux limon, la lise de Garonne, qui rend les terres si fertiles. Redoutés car ses furies sont parfois dévastatrices : digues emportées, maisons englouties, routes crevées, bétail et parfois personnes disparues. Les riverains ont appris à vivre avec Garonne et s’ils n’ont pas pu l’apprivoiser, ils se sont adaptés : maisons construites sur des « terrats » où bêtes et hommes sont au sec pour attendre la décrue.

On ne sera donc pas étonné que le vocabulaire local concernant la vie au bord de Garonne soit très riche et très spécifique et en occitan bien entendu, certains mots sont passé en français dans le parlé local comme une matte, une cale, un terrat…

Los mojens de defensa contra los aïgats. Les moyens de défenses contre les crues :

Aïgats : inondations, crues.

Una jaula : (Prononcer jaoulo,)  c’est un bras latéral à la Garonne que le fleuve à creusé ou qu’il emprunte lors d’une inondation, il sert de déversoir et retarde la montée des eaux.

Una paissièra (uno païssièro) ; est une petite digue, souvent en bois, pour fermer une « jaula » et garder l’eau après les crues.

Una traina o braguèa (uno traïno o braguèo) revêtement de poutres pour protéger les berges

Un peirat (un peïrat) : renforcement des berges en pierres, un pierrier

Una mata (uno mato), une mate : digue protégeant un village, une propriété contre l’inondation.

Un pas : Passage de chemin au dessus des digues avec montée et portes à glissière.

Un terrat : petite butte artificielle servant de refuge à bétail et de motte pour construire la métairie. De hauteur suffisante pour que bêtes et hommes soient au sec en attendant la décrue.

Una arruia, un hossat una barata (uno arrouio, un houssat uno barate) petit fossé d’écoulement.

Una baradassa (uno baradasso) est une rigole d’assèchement des zones marécageuses pour évacuer les eaux stagnantes laissées par le fleuve.

Los arbres e las pradas inondablas. Les arbres et prairies des zones inondables :

Una aubarèda (uno aoubarèdo) plantation d’aubiers sur les rives de Garonne

Lo jetin (lou jétin) : taillis de saules en Garonne

Una ormenada (uno ourmenado) : taillis d’ormeaux ancienne végétation de Garonne aujourd’hui disparue.

Una biulada (uno bioulado) plantation de peuplier. Lo biule : le peuplier. On dit aussi pibolèra (piboulèro). Pίbol autre nom du peuplier.

Una vimièra (uno vimièro) plantation d’osiers ; Lo vime : l’osier.

Un pradet, una pastèrna, un baralh ou un pastenc (un pradet, uno pastèrno, un pasténc) nom donné selon l’endroit à une prairie naturelle dans les terres mouillées de Garonne.

On appelait òbre le bois d’œuvre de Garonne que travaillaient les ressegaires (résségaïrés) scieurs de long.

La navigacion sus Garona. La navigation sur Garonne :

La tira (la tiro) : le halage des bateaux

La còrda o malha (la cordo ou maillo) : le câble de hallage.

Un passatge : port sur Garonne ; lo Passatge d’Agen.

Una canèla (uno canèlo): passe draguée dans les maigres.

Un magre  (un maigre) : passage à très faible tirant d’eau qu’il faut draguer pour ne pas râcler.

Un platan : un banc de galets à fleur d’eau.

Una cala  (uno calo) une cale : petit port composé d’un quai en paliers successifs permettant d’accoster malgré les différents niveaux du fleuve.

Un corau (un couraou) : un coureau bateau de 60 tonnes

Una gabara (uno gabaro, )une gabarre : bateau ponté pouvant tenir la mer.

Un macalet : bateau de Garonne de 30 tonnes.

Miola (miolo): la miolle, le véritable bateau de Garonne (20 tonnes pouvant remonter jusqu’à Toulouse.

Lo ramonur (lou ramounur) : le ramoneur bateau de 15 tonnes.

Lo gabarot (lou gabarot) : bateau de 100 quintaux.

Una cardina (uno cardino):une cardine radeau de bois.

La bergada (la bergado) longue perche pour diriger le bateau

Lo picon (lou picoun) : long gouvernail placé à l’avant du bateau pour le diriger à la descente

Una nauca (uno naouco) bac pour passer la rivière.

Un coralin : un couralin grand bateau de sauvetage où l’on peut embarquer le bétail.

Un marinièr, marénièr o nautonièr (marinier ou nautonier) marin de rivière.

Un capòt : un charpentier de bateau.

Un boscassièr (un bouscassièr) : d’après Deffontaines[2] ce mot qui désigne les bûcherons désignait aussi le bouvier qui menait les bœufs de halage.

Lo paisatge de Garona. Aspect physique du paysage de Garonne :

Bassura (bassuro :) zone inondable, basse plaine

Hautura (haouturo) : Haute plaine, zone des terrasses des vallées.

Hauturenc (haouturènc) : habitant des terrasses.

Mata (mato): une matte, haute berge de Garonne rehaussée couverte de limon ou digue.

Tap : talus, rebord de la terrasse sur la plaine inondable.

Nausa (naouze) : nauze, marais dans la plaine inondable.

Lisa, badassil : (liso, badassil) : lise, limon déposé par Garonne.

Grave  (prononcer graoueu) : galet déposé par Garonne.

Gravèr (graouè): plage de galets, le Gravier à Agen par exemple.

Sable bastard : alluvions sableuses infertiles déposées en plaine de Garonne par les petits affluents comme l’Avance par exemple.

Pesca e peishes en Garona. Pêche et poissons en Garonne :

Pescaïre : pêcheur.

La biròla (birolo) : filet tournant entraîné par le courant et installé sur un bateau.

L’escave (escaoueu) : grand filet à aloses tiré depuis la berge par des chevaux.

Lo colde (couldé) : grand filet à lamproies.

Una filadièra (filadière) : un bateau de pêche.

- Los peishes. Les poissons

Lo trògue (lou trogue): le goujon. Lo ravasan o l’aregolha (lou raouasan ou l’arégouillo) : le vairon. Lo petaire, lo gardon o lo planton : le gardon. Lo petaire roge o l’avesque : le rotengle. Lo créac : l’esturgeon mâle. Lo colac (lou coulac) : l’alose. La lemprega o lampresa:[3] la lamproie. L’anguila o anguiala : l’anguille. Lo barbèu : le barbeau. Lo bechet o bèc gròs : le brochet. Lo cabòt o cabeire : le chevaine ou chevesne. La carpa comuna e la carpa miralh : la carpe commune et la carpe miroir. L’escanagat o peis picant (étrangle chat ou poisson piquant) : l’épinoche. Lo flet, lo carrelet, o la platucha : le flet ou fletan, appelé platuche dans le marmandais, (seul poisson plat d’eau douce). La garlesca : l’ablette. Lo mul o mujol : le muge ou mulet. Lo peis-cat : le poisson chat. La pèrca : la perche. La pèrca d’America, la perca negra o blacbàs : la perche d’Amérique, la perche noire ou black-bass. La pèrca solelh, lo calicobas : la perche soleil appelée aussi perche arc-en-ciel. Lo saumon : le saumon. Lo tacon : lo joen saumon. Lo becard : saumon qu’es pas mòrt après aver groat. Lo sandre : le sandre. Lo silur : le silure. La tenca : la tanche

Le sandre ne faisait pas partie des espèces endémiques de Garonne, il a été importé au même titre que le Silure qui colonise le fleuve aujourd’hui.

La pesca : la pêche.

- Pesca a las escas naturalas : au vèrm roge, a l’asticòt, a la sautarèla, au grit, au ravasan mòrt, au viu, au fromatge. Pêche aux appats naturels : au ver rouge, à l’asticot, à la sauterelle, au vairon mort, au vif, au fromage.

- Pesca aus cimbèls : mosca artificiala, mosca seca, mosca negada o nimfa, au culhièr, au devon…Pêche aux leurres : mouche artificielle, mouche sèche, mouche noyée ou nymphe, à la cuiller, au devon…

Maintenant que le « Pays » est défini, que les différents décors sont plantés, que le paysage et les activités humaines sont plus ou moins connus, que quelques notions sur la langue gasconne, sur la toponymie et sur la patronymie ont été abordées vous allez pouvoir goûter les saveurs des contes légendes ou histoires qui sont le patrimoine immatériel de notre Gascogne Lot et Garonnaise. C’est comme un mets d’exception, on ne peut en savourer toute les subtilités que si on peut en reconnaître tous les arômes.

Nous allons évoquer le « pays » à travers les communes ou « paroisses » qui le composent ou le composaient. On évoquera le Marmandais, la moyenne Garonne, le Bazadais et le Sud Gironde tout proches, le Queyran, l’Albret. Après Marmande nous irons au Mas, à Bouglon, à Monheurt, à Casteljaloux, Pindères ou Cocumont… à travers des récits d’auteurs anciens ou contemporains ou des collectages effectués auprès des aînés….

Bon Voyage ! Ou plutôt bonne randonnée pour prendre le temps de flâner en Marmandais…de s’arrêter… car ici,   si tu t’arrêtes, si tu écoutes, c’est le « pays » qui se met en marche ! 


[1] Aigats : crues, inondations

[2] Pierre Deffontaines historien et géographe, agrégé de l’université a publié à Lille en 1932 un ouvrage de référence : « Les hommes et leurs travaux dans les pays de la Moyenne Garonne » réédité en 1978 par la librairie Quesseveur à Agen.

[3] Los noms deus peishes cambian d’un bòrd a l’autre de Garona, en gròs, riba gaucha que se parla gascon e riba dreta lengadocian.

Joomla SEF URLs by Artio